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Le président Ilham Aliyev interviewé par le directeur général de l’agence de presse internationale « Rossiya Segodnya » MIS A JOUR VIDEO
Bakou, 18 décembre, AZERTAC
Le président de la République d’Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, a été interviewé ce mardi par Dmitry Kiselev, directeur général de l’agence de presse internationale « Rossiya Segodnya », auteur et présentateur de l’émission « Vesti Nedeli » sur la chaîne de télévision « Rossiya-1 », pour la Société nationale de radiodiffusion et de télévision de Russie et l’agence russe RIA Novosti.
L’AZERTAC présente l’interview dans son intégralité.
Monsieur le Président, nous vous exprimons notre sincère gratitude pour avoir accepté d’accorder une interview à la Société nationale de radiodiffusion et de télévision de Russie et à l’agence de presse RIA Novosti. En 2022, littéralement quelques jours avant le début de l’opération militaire spéciale, en quelques heures, vous avez signé à Moscou, avec le président Poutine, la Déclaration sur l’interaction d’alliance. Depuis lors, le monde a radicalement changé. Que signifie aujourd’hui l’alliance entre l’Azerbaïdjan et la Russie ?
– Oui, vous avez tout à fait raison. La Déclaration sur l'interaction d’alliance a été signée le 22 février 2022. Et comme vous l'avez souligné à juste titre, la situation dans notre région et dans le monde en général a subi des changements significatifs, mais cela n'a pas affecté la nature et la forme de la coopération entre la Russie et l'Azerbaïdjan. Je considère que la signature de cette déclaration est une démonstration du grand chemin que nous avons parcouru ensemble au cours de ces plus de 30 dernières années, en travaillant activement, en renforçant le potentiel de coopération dans les domaines commercial, économique, politique et en nous mettant à l'épreuve dans diverses situations complexes. Par conséquent, je considère que le simple fait de signer une telle déclaration est une étape politique majeure, tant de la part de la Russie que de la part de l’Azerbaïdjan. C’est la forme la plus élevée de la coopération et de l’interaction. D’autant plus que nous sommes des pays voisins, voisins dans le Caucase ainsi que dans la région de la mer Caspienne, et que dans une grande mesure, les priorités de notre politique étrangère sont convergentes, donc, bien sûr, la signature de ce document est un événement historique, je dirais.
Et bien sûr, en tant qu’alliés, nous avons immédiatement commencé à travailler activement sur différentes directions, y compris celles qui se trouvaient dans l’ombre de notre format bilatéral.
Au cours des années écoulées depuis la signature de la déclaration, s’est tenue une visite très significative, également historique, du président de la Russie, Vladimir Vladimirovitch Poutine, en Azerbaïdjan. Il a effectué de nombreuses visites dans notre pays, mais cette visite est particulière. Il s'agissait d'une visite d'État, la première, qui a eu lieu cet été. Dans le cadre de cette visite, nous avons non seulement confirmé le caractère d’alliance de nos relations, mais aussi esquissé les voies de développement de l'interaction bilatérale. Aujourd'hui, la Russie et l'Azerbaïdjan sont deux partenaires fiables, et je pense qu'il n'y a aucun doute à ce sujet, ni en Azerbaïdjan ni en Russie. Comme je l'ai déjà dit, en période difficile pour nos pays, nous avons toujours fait preuve de compréhension de la situation et agi de manière amicale. Je suis convaincu que ce sera le cas à l’avenir.
Nous continuons bien sûr à chercher activement de nouveaux domaines pour la coopération commerciale et économique. Le volume des échanges commerciaux augmente, peut-être pas aussi rapidement que nous le souhaiterions, mais néanmoins, une dynamique existe. De plus, nous revenons au niveau d’avant-Covid pour les visites des Russes en Azerbaïdjan, ce qui témoigne également du fait que l'atmosphère est extrêmement positive tant sur le plan politique qu’humain, car ces voyages et visites mutuelles se font dans des directions où les gens se sentent à l’aise. Nous constatons une croissance significative des visites mutuelles au cours des 2 et 3 dernières années. Et la principale preuve en est l'augmentation du nombre de vols entre nos pays. Je pense qu'ils sont désormais au moins deux fois plus nombreux qu’à l’époque soviétique.
Nous sommes donc heureux de la façon dont nos relations se développent, nous y tenons beaucoup, et je suis convaincu que cette dynamique positive sera maintenue l’année prochaine.
– Néanmoins, pour la Russie, c’est actuellement une période de guerre. L’OTAN déclare que l'alliance doit être prête à la guerre avec la Russie dans les 5 à 7 prochaines années. À cet effet, une préparation pratique est en cours. Le système de mobilisation a été modifié, comme l’a mentionné Andreï Belooussov lors de la réunion élargie du ministère de la Défense de Russie lundi, en soulignant que dans les 10 jours suivant, il devrait y avoir 100 000 soldats de l’OTAN à la frontière de la Russie, en 30 jours – 300 000 soldats, et en 180 jours – 800 000 soldats. En 2026, l’OTAN prévoit de déployer des missiles à portée moyenne en Allemagne, malgré l’avertissement de Poutine selon lequel la Russie ne le fera pas si l’OTAN ne le fait pas. Le ministre russe de la Défense, Andreï Belooussov, a déclaré lors de la réunion élargie du ministère de la Défense, en présence du président russe, que la Russie doit être prête à la guerre avec l’OTAN dans la prochaine décennie. Qu’est-ce que cela signifiera pour les relations d’alliance entre l’Azerbaïdjan et la Russie ?
– Je tiens néanmoins à exprimer l'espoir que l'on n'en arrivera pas à une confrontation ouverte entre l'OTAN et la Russie. D'abord, parce que tout le monde comprend les conséquences catastrophiques que cela aurait pour le monde entier, pour tous les pays et, bien sûr, pour ceux qui sont voisins de la région. Ensuite, j'espère toujours que le changement d’administration aux États-Unis entraînera également un changement dans les orientations de leur politique étrangère. Cet espoir est alimenté par l'expérience de la présidence de M. Trump pendant son premier mandat, ainsi que par les déclarations qu'il a faites, lui et les membres de son équipe, pendant la campagne électorale et après celle-ci. Par conséquent, envisager un scénario où l'OTAN et la Russie se retrouveraient dans une guerre chaude, c'est un peu comme imaginer une apocalypse mondiale. Il est évident qu'il n'y aurait pas de vainqueurs dans cette guerre. Et aucun pays, même éloigné, par exemple, de la région de l'OTAN ou du territoire russe, ne se sentirait en sécurité. Je pense qu'il y aura suffisamment de sagesse politique à Washington, à Moscou, ainsi que dans d'autres capitales, pour éviter qu'un tel scénario catastrophique ne se réalise.
En ce qui concerne les engagements de l'Azerbaïdjan, nous prenons tous nos engagements avec la plus grande responsabilité et nous continuerons ainsi à l'avenir. Je pense que l'Azerbaïdjan peut également contribuer à la cause, en apportant quelque chose d'un peu oublié, à savoir la détente. Je pense que ce mot est maintenant pertinent dans le lexique international, et j'espère qu'il sera utilisé. En raison des particularités de la politique étrangère de l'Azerbaïdjan, et du fait que l'Azerbaïdjan est perçu en Occident et en Orient comme un acteur totalement indépendant, menant une politique étrangère autonome, ainsi que du fait que c'est le seul pays qui soit à la fois allié de la Russie et allié de la Türkiye, membre de l'OTAN. Il n'y a pas d'autre pays semblable dans le monde. Par conséquent, si l'on poursuit la logique de nos engagements, nos engagements d’alliance sont diversifiés. Et nous, bien sûr, partirons de la situation réelle sur le terrain. Je tiens encore une fois à souligner que, peut-être, à un certain moment, les efforts de l'Azerbaïdjan seront demandés. Une série de rencontres a eu lieu ici, entre le chef d'état-major de l'armée russe et le président du Comité militaire de l'OTAN. De plus, les responsables militaires des États-Unis et de la Russie se sont rencontrés à Bakou. Cela n'a pas été choisi par hasard. Il n'y a pas beaucoup de pays en qui on a confiance à la fois en Occident, en Russie et en Orient. Et il n'y a pas beaucoup de pays qui ne sont pas engagés par un membre formel ou informel dans des structures politico-militaires. Par conséquent, nous sommes prêts, si le besoin se fait sentir, à apporter notre contribution à la détente des tensions.
- En Russie, cette guerre n'est pas perçue comme une guerre avec l'Ukraine, mais comme une bataille civilisationnelle avec l'Occident sur le territoire de l'Ukraine pour une nouvelle configuration du monde, car chaque paix est le résultat d'une guerre, et ça, l'Azerbaïdjan le sait très bien, bien sûr. Vous parlez des relations d’alliance avec la Türkiye. Une base militaire turque est-elle nécessaire en Azerbaïdjan ?
– Non, ce n'est pas nécessaire. C'est la réponse courte. Si je devais un peu élargir ma réponse, en tenant compte du fait que de temps en temps, cette information apparaît dans certains médias, je dois dire qu’il n’y en a pas besoin. L'Azerbaïdjan entretient une coopération militaire avec la Türkiye depuis la restauration de son indépendance, depuis début 1992. C'est alors que cette coopération militaire a commencé et elle se poursuit jusqu'à présent. Bien sûr, les formes de coopération changent en fonction des besoins, mais je dois dire qu'au cours de ces plus de 30 ans, la Türkiye et ses organismes militaires ont joué un rôle majeur dans la modernisation de l'armée azerbaïdjanaise et dans l'alignement de celle-ci sur des normes élevées, tant en termes de capacité de combat que de planification des opérations, d'analyse de la situation et de potentiel du renseignement militaire. Nous sommes donc très reconnaissants à nos amis turcs pour cette assistance.
Dans la Déclaration sur l’alliance entre la Türkiye et l'Azerbaïdjan, signée un an avant la Déclaration entre l'Azerbaïdjan et la Russie, il y a un point qui prévoit une aide militaire mutuelle en cas de menace ou d’agression. Cela signifie que c'est un engagement de l'Azerbaïdjan et de la Türkiye à se venir en aide si l'un ou l'autre pays fait face à une menace extérieure ou à une agression extérieure. Par conséquent, ce point de la déclaration rend totalement inutile la création d'infrastructures militaires permanentes sur un territoire quelconque.
Revenant encore une fois aux rumeurs d'information, je voudrais dire qu'il est pratiquement impossible aujourd'hui de cacher une base militaire, où que ce soit dans le monde. Par conséquent, ces rumeurs d'information ne sont en réalité que des spéculations politiques. Avec la Türkiye, nous effectuons chaque année plus de 10 exercices militaires conjoints – la moitié en Azerbaïdjan, la moitié en Türkiye, et nous avons, en fait, atteint un haut degré de capacité opérationnelle dans les opérations militaires. Et bien sûr, cela constitue un facteur important de stabilité au Caucase. Car le monde d'aujourd'hui et la façon dont les événements se déroulent prouvent une fois de plus que le monde a radicalement changé, et que les réalités qui ont été créées et les règles du jeu établies à la fin de la Seconde Guerre mondiale ne fonctionnent plus aujourd’hui, et même les grands acteurs mondiaux ne le cachent pas. Le facteur de la force refait surface dans les ambitions politiques. Et les pays qui l'ont compris plus tôt que plus tard sont ceux qui peuvent se sentir plus en sécurité aujourd'hui. Bien que probablement aucun pays ne puisse se sentir complètement en sécurité dans le monde d'aujourd'hui.
- L'Azerbaïdjan prévoit-il de continuer à acheter des armes russes, et dans quelles quantités ?
- Oui, mais je dois dire que ces trois dernières années, au moins, aucun nouveau contrat d'achat d'armes russes n'a été signé. La raison en est que l'industrie de la défense russe, disons, travaille principalement pour le consommateur intérieur. À ma connaissance, la Russie s'est temporairement éloignée du marché international des armes, pour des raisons évidentes. Même certains contrats signés il y a 4 ans ont vu leurs délais de mise en œuvre repoussés à la demande de la Russie. Et nous l’avons accepté, comprenant la situation, en raison de laquelle ces contrats ne peuvent pas être réalisés. Cependant, nous suivons attentivement les nouveautés de l'industrie de défense russe. Nous avons déjà soumis de nouvelles demandes, que nous avons envoyées récemment, et dès que l'industrie de défense russe sera prête, nous conclurons naturellement de nouveaux contrats. Donc, je considère ce processus comme temporairement suspendu pour des raisons objectives.
- Nikol Pachinian a déclaré qu'il avait atteint un point de non-retour dans ses relations avec l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) et qu’il intensifiait ses relations avec la France. Que cela signifie-t-il pour la sécurité régionale, et pour l’Azerbaïdjan en particulier ?
Cela représente une menace immédiate, à propos de laquelle nous avons plusieurs fois exprimé nos préoccupations, tant publiquement que lors de mes négociations avec le Premier ministre arménien. Nous avons également fait part de cette inquiétude au gouvernement français et aux dirigeants des États-Unis, qui, sous l'administration Biden, ont modifié leur approche équilibrée envers les pays du Caucase du Sud pour adopter un soutien unilatéral à l'Arménie. Il existe de nombreux exemples montrant que les menaces sont suffisamment graves. Les armes que le régime de Macron fournit à l’Arménie sont des armes offensives, mortelles, qui représentent une menace pratique pour l'Azerbaïdjan. Étant donné que la longueur de notre frontière avec l'Arménie dépasse mille kilomètres et que de nombreux villages sont situés près de la frontière, avec un grand nombre de réfugiés retournant dans ces localités, nous ne pouvons évidemment pas observer tout simplement ce processus. Nous avons à plusieurs reprises fait savoir à l'Arménie et à ses protecteurs au Département d'État des États-Unis que cela doit cesser. Mais, malheureusement, nous n'avons pas été entendus, et le processus de réarmement de l'Arménie progresse à grands pas. Nous surveillons, dans la mesure du possible, tout ce qui se passe là-bas. Etant donné la profondeur du territoire arménien, ce n'est pas si difficile à faire aujourd'hui d'un point de vue technique. La France est bien sûr en tête dans cette question. En deuxième position se trouve l'Inde, et en troisième les États-Unis. Bien que la France et l'Inde ne cachent pas qu'elles fournissent des armes mortelles à l'Arménie, elles en sont même assez fières, probablement pour nous défier, tandis que les États-Unis ne l'admettent pas. Mais nous avons suivi les avions de transport militaire qui se posaient dans les aéroports arméniens et y transportaient des armes.
Nous sommes naturellement contraints de prendre des mesures adéquates. Notre prochain budget militaire, pour l'année 2025, sera d'environ cinq milliards de dollars, un budget record. C'est donc une nécessité. Au moins 60 % de cette somme n’aurait pas été dépensée si de telles menaces n'avaient pas existé. Nous l’aurions utilisée pour la reconstruction du Karabagh, pour les aides sociales, etc. Mais nous sommes contraints de le faire et nous le ferons. Je pense que c'est une voie néfaste. Tout d’abord, l’Arménie ne pourra pas se lancer dans la course aux armements contre nous, malgré le fait qu’une grande partie de leurs armes provient de l'Occident, soit gratuitement, soit sous forme de crédits qui, bien sûr, seront ensuite annulés. Mais même dans ce cas, elle ne le pourra pas. Les résultats de la Seconde guerre du Karabagh et de l'opération antiterroriste de septembre 2023 ne doivent pas être oubliés. Ils doivent aussi comprendre que s'ils envisagent une nouvelle provocation contre nous ici, sur le terrain, personne ne viendra à leur secours, malgré le soutien maximal du régime de Macron et du Département d'État des États-Unis. Eh bien, comme Macron les a aidés en 2020 ou en 2023, il les a soutenus, oui, peut-être en leur tenant la main, je ne sais pas, peut-être aussi d’autres parts. Voilà tout. Nous savons exactement ce dont il est capable. Ainsi, nous faisons savoir, et nous continuerons de faire savoir, tant dans le cadre du processus de négociation que dans celui de la commission de délimitation qui opère entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, ainsi qu’aux sponsors arméniens, partisans de Soros à Washington, que cela doit cesser. Et si cela continue, alors il ne faudra pas qu'ils aient de reproches à nous faire par la suite.
- Mais à un moment donné, il semblait que l’accord de paix était sur le point d’être conclu. Pourquoi ne l’a-t-on pas conclu ? On s’y attendait littéralement.
- Oui. Ces deux processus ont été, pour une raison quelconque, séparés en Occident. Pourtant, nous estimons que ces deux processus devraient être intégrés. Un accord de paix et l'armement simultané de l'Arménie contre nous sont deux voies incompatibles. En effet, nous avons fait de grands progrès concernant l'accord de paix. Sur les 17 articles de ce document, 15 ont été acceptés, il en reste deux. Et lors de ma dernière rencontre avec le Premier ministre arménien à Kazan, ce que j'ai entendu et ressenti, c'est que ces deux articles non approuvés pourraient aussi être acceptés par l'Arménie, je parle de nos conditions. Dans ce cas...
- Quelles sont ces articles, pour être plus précis ?
- L'un d'eux concerne l’abstention de déposer des recours internationaux l’un contre l’autre. Je pense que c'est un article mutuellement acceptable. Nous avons récemment terminé une analyse détaillée des dommages causés, une analyse minutieuse. Nous avons mis 4 ans à le faire et tout est documenté. Cela représente plus de 150 milliards de dollars - les dommages causés pendant les années d'occupation. Donc, l'abstention de déposer des recours l’un contre l’autre, je pense que cela serait mutuellement acceptable. L'autre article concerne la non-installation de représentants d'autres pays à notre frontière. Pourquoi est-ce important pour nous ? Parce qu'avec le prétexte de soi-disant observateurs européens, une infrastructure de l'OTAN a été établie du côté arménien à notre frontière. La question de l'envoi de ces observateurs avait été convenue avec nous lors de la réunion quadripartite d'octobre 2022 entre Pachinian, le président du Conseil européen Charles Michel, le président français et moi-même. À ce moment-là, la France n'avait pas encore été exclue de notre processus de normalisation. Il avait été convenu qu'un contingent limité de représentants de l'Union européenne serait...
- C'était précisément des observateurs...
- C'était précisément des observateurs. Pendant deux mois, 40 personnes allaient être déployées. Après cela, la mission a été prolongée sans notre accord, et l'argumentation était la suivante : pourquoi faudrait-il s'entendre avec vous, c'est une mission sur le territoire de l’Arménie. Mais notre argument était : pourquoi en avons-nous discuté avec vous lorsque nous avons convenu de cela. Ce n'est pas acceptable. Ensuite, le nombre a été augmenté à plus de 200 personnes. De plus, cette mission s'est lentement transformée en une mission de l'OTAN, puisque des représentants du Canada s'y sont joints. Voilà donc le deuxième article sur lequel nous devons parvenir à un accord.
Il y a encore deux points que la partie arménienne doit accomplir. Le premier est de modifier sa constitution. En effet, dans la constitution, il y a une référence à la Déclaration d'indépendance, qui, à son tour, contient des revendications territoriales à l’encontre de l'Azerbaïdjan, déclarant que l’ancienne région autonome du Haut-Karabagh fait partie de l'Arménie. Ainsi, la modification de la constitution n'est pas une demande de notre part, mais une condition objective. Le deuxième est la dissolution du Groupe de Minsk de l'OSCE. Car cette question est décidée par consensus, il est formellement impossible de la résoudre sans l'accord de l'Arménie. Bien que le Groupe de Minsk de l'OSCE soit inactif depuis longtemps, il existe toujours formellement. Et notre question est la suivante : si l'Arménie a reconnu le Karabagh comme faisant partie de l'Azerbaïdjan, et que le Groupe de Minsk a été créé pour résoudre la question du Karabagh, pourquoi est-il encore nécessaire ? Autrement dit, le refus de l'Arménie de dissoudre ce groupe, et de s'adresser avec nous à l'OSCE pour demander sa dissolution, montre que les plans des revanchistes sont assez sérieux. Voilà, si tout cela est réglé, il n'y aura plus d'obstacles à la signature d'un traité de paix.
En ce qui concerne la poursuite de la course aux armements, cela ne peut bien sûr pas faire partie du traité de paix, mais cela fera partie d'un autre format d'interaction avec l’Arménie. Nous continuerons à essayer de faire comprendre à la partie arménienne, en priorité pour leur propre bien, le caractère nuisible de ce genre d’actions.
- Reste-t-il encore des Arméniens au Karabagh ? Que se passe-t-il là-bas actuellement ?
- Il y a environ deux mois, la dernière information indiquait qu'il restait environ 20 habitants d'origine arménienne dans la région. Avant d’effectuer notre opération antiterroriste d'une journée en septembre 2023, nous avons officiellement publié un plan de réintégration des Arméniens du Karabagh dans l’État azerbaïdjanais. Cela a été rendu public et affiché sur Internet. Nos nombreuses tentatives d'établir un contact avec les représentants de la communauté arménienne ont échoué. Ils nous ignoraient, ne voulaient pas nous rencontrer ni dialoguer avec nous. Par conséquent, afin d'attirer l'attention de ceux qui vivent là-bas, nous avons publié ce plan sur Internet. Il est clairement détaillé, et tout le monde peut le consulter, en incluant des informations sur l'éducation, la préservation de l'environnement culturel, la réintégration, les voies d'intégration, soit par une demande de résidence, soit par une demande de citoyenneté, ainsi que l’autorisation de travail. Eh bien, c’est comme ça. Si certains d’entre eux pensaient qu’après tout ce qui s’est passé, ils vivaient dans une « République du Haut-Karabagh » indéfinie, c’est leur problème. C’est comme n’importe quel autre cas. Par exemple, un Azerbaïdjanais qui part travailler en Russie obtient un permis de séjour ou un permis de travail, s’enregistre, puis demande la citoyenneté. C’est ce processus. Et nous leur avons proposé cela, mais ils l’ont rejeté. Et lorsque la situation a changé là-bas, ceux qui sont restés – ils étaient un peu plus de 30 personnes, certaines sont ensuite parties – mais ceux qui sont restés continuent à recevoir de l’aide sociale de l’Azerbaïdjan, de la part du ministère du Travail et de la Protection sociale, leur traitement, leur approvisionnement en nourriture, leur vie y sont entièrement assurés. Donc, la question réside dans cela.
Parallèlement à cela, la communauté des Azerbaïdjanais originaires d’Arménie, qui en ont été expulsés à la fin des années 1980 et au début des années 1990, constitue environ 300 000 personnes, a officiellement adressé une demande au gouvernement arménien pour que des conditions soient également créées pour leur retour et leur réintégration.
- Déjà en Arménie ?
- Déjà en Arménie. Le fait qu'ils en aient été expulsés au début des années 1990 ne signifie pas qu'ils n'ont pas de droit d’y retourner. Nous n'avons toujours pas reçu de réponse de la part du gouvernement arménien sur la manière dont ils envisagent le processus de réintégration des Azerbaïdjanais dans leurs terres historiques. Je pense que si ces deux processus se déroulent parallèlement, cela créera une meilleure atmosphère sociale pour la paix. Parce que la paix, ce n'est pas seulement une signature d'accord, c'est aussi un consensus social. Et les blessures que nous avons subies pendant les années d'occupation ne sont pas encore guéries, malgré ces 30 ans. Ça prend du temps. Et pour cela, il faut un climat social, de la communication, il faut parler un langage humain. Voilà la situation actuelle.
- Les entreprises russes participent-elles à la reconstruction du Karabagh ? Pouvez-vous en parler ?
Oui, récemment, un projet a été lancé pour la construction d'une école maternelle, sur instruction du gouverneur de la province d'Astrakhan. Il nous a récemment rendu visite et s’est également déplacé dans la région de Goubadly, où cet établissement d’infrastructure sociale est en construction. Nous sommes donc très reconnaissants pour cette attention. Il y a plusieurs entreprises russes qui participent en tant que fournisseurs de biens et de services pour la reconstruction. Il y a également des entrepreneurs russes, mais je ne dirais pas qu'ils sont nombreux. Je pense que leur nombre pourrait être plus élevé, car l'ampleur des travaux de restauration est assez vaste et couvre principalement des projets d'infrastructure, des routes, des chemins de fer, des tunnels, des ponts. Il y a donc de nombreuses entreprises russes ayant une grande expérience dans ce domaine. Donc, nous...
- Vous l'apprécieriez ?
- Oui, sans aucun doute. Nous l'apprécierions et nous l'apprécions déjà. Tant en termes d'aide fournie par la provonce d'Astrakhan que par la participation à des projets. Il y a des projets d'investissement. Le premier projet d'investissement a d'ailleurs été réalisé par le Tatarstan. Il s'agit du centre de services « Kamaz » dans la région de Djabraïl, qui a été inauguré par le dirigeant du Tatarstan et moi-même. D'ailleurs, aujourd'hui, j'ai également une rencontre avec le dirigeant du Tatarstan. Une délégation du Tatarstan se trouve à Bakou. Donc, c'était le premier projet d'investissement, c'est-à-dire que le premier projet d'investissement étranger était également russe. Nous attendons donc des investissements et serons également heureux d'accueillir des entrepreneurs.
- Très agréable. L’Azerbaïdjan a-t-il besoin d'une centrale nucléaire ?
- Je vais un peu détailler notre agenda énergétique pour que les spectateurs comprennent bien où nous en sommes et ce que nous faisons. Les réserves prouvées de gaz naturel en Azerbaïdjan constituent 2,6 billions de mètres cubes. En tenant compte du fait que notre champ pétrolier exploité depuis 30 ans, selon les nouvelles estimations, est passé de 500 millions de tonnes à 1,5 milliard de tonnes, on peut dire à peu près la même chose pour nos gisements de gaz et de condensat de gaz. En d'autres termes, 2,6 billions représentent des réserves estimées il y a dix ans. Il est évident qu'avec un tel potentiel et un volume d’exportation de 25 milliards de mètres cubes, nous n'avons pas besoin de sources d'énergie supplémentaires. De plus, dans le Karabagh et le Zenguézour oriental, nous avons déjà mis en œuvre, au cours des trois dernières années, des projets de petites centrales hydroélectriques d'une capacité d'environ 300 mégawatts, et cela atteindra 500 mégawatts dans les deux prochaines années. De plus, nous développons activement l'énergie solaire et éolienne grâce aux investissements étrangers. Selon les évaluations de la Banque mondiale, les réserves d'énergie éolienne seulement en mer Caspienne sont de 157 000 mégawatts. D'ici 2030, les contrats déjà signés et ceux en cours nous permettront d'atteindre 6 000 mégawatts. Cela constitue donc une partie de la réponse à la question de savoir si nous avons besoin d'une centrale nucléaire. Je vais maintenant aborder un autre sujet, et je pense que cela pourrait être intéressant. Tout d'abord, du point de vue d'un autre secteur de l'économie.
- C'est tout un secteur.
- Bien sûr. C'est un secteur, c'est un potentiel, c'est quelque chose de totalement nouveau que nous n'avons jamais eu auparavant. Deuxièmement, c'est la tendance qui existe dans le monde, et nous ne voulons pas en rester à l'écart. C'est pourquoi j'ai déjà donné des instructions pour étudier la possibilité d'installer des mini-réacteurs à des fins scientifiques, afin de voir ce que cela pourrait nous apporter sous cet angle.
Étant donné que ce projet est coûteux, et sachant que les projets d'énergie solaire et éolienne en Azerbaïdjan sont réalisés par des investisseurs étrangers, l'État n'y investit rien, mais bénéficie simplement de ce potentiel, nous serions bien sûr plus intéressés par des projets d'investissement. Si une entreprise d'un autre pays manifeste son intérêt, nous pourrions également être co-investisseurs. Et je pense que ce pourrait être un bon projet pour les investissements, car actuellement, dans les jours à venir, probablement dans les prochaines semaines ou peut-être quelques mois, l'étude de faisabilité pour la construction d'un câble énergétique entre l'Azerbaïdjan et l'Europe, via le fond de la mer Noire, sera terminée. Au début, il s'agira de 4 000 mégawatts, mais étant donné les besoins énergétiques des pays européens, même s'ils investissent beaucoup eux-mêmes, nous savons qu'ils seront toujours en déficit. Par conséquent, des sources supplémentaires d'énergie verte et propre leur seront nécessaires. Cela pourrait donc être un bon moteur. De plus, les prix de l'électricité en Azerbaïdjan sont tels que les investissements dans ce secteur et la vente d'électricité aux consommateurs sont tout à fait rentables d'un point de vue commercial pour les entreprises. Voilà donc comment j'ai tenté de répondre à la question. Ce n'est ni oui ni non. C'est plutôt oui, mais... Et c'est là que commence notre travail à faire.
- Récemment, l’Azerbaïdjan a organisé un grand sommet climatique. A quelles difficultés vous êtes-vous confrontées et quels en sont les principaux résultats ?
- La principale difficulté consistait à ce que nous étions limités par le temps. En général, les pays ont deux ans pour se préparer. Dans notre cas, nous n'avions que 11 mois. Cela était dû au fait qu'encore 2 et 3 jours avant la prise de décision en décembre dernier, l'Arménie bloquait la candidature de l'Azerbaïdjan. Et comme il n'y avait pas de consensus, la question de savoir si la COP29 se tiendrait à Bakou ou non a été décidée dans les derniers jours. Nous n'avons donc eu que 11 mois pour nous préparer, et cela a été la plus grande difficulté. Il fallait aménager des espaces pour accueillir plus de 70 000 personnes. Le nombre d'inscrits était de 76 000. Il a fallu non seulement loger les participants, mais aussi refaire la certification des hôtels, car nous ne disposions pas d’un nombre suffisant de chambres pour accueillir autant de personnes, et déterminer les lieux d’hébergement pour les invités. Pour cela, différentes zones de repos ont été aménagées, ainsi que des bâtiments résidentiels qui n’étaient pas encore inaugurés mais déjà construits, qu’il fallait mettre aux normes hôtelières. Cela a été un énorme travail organisationnel, et nous l’avons accompli avec succès. D’après ce que je sais, pendant toute la durée de la conférence, il y a eu 10 plaintes concernant l’organisation, qui ont été rapidement réglées, et, comme on dit, tous les invités étaient satisfaits.
La deuxième difficulté, si on peut l'appeler ainsi, je dirais plutôt un certain inconfort, a été un sentiment d’agression totalement injustifié, une sorte de méchanceté mêlée de l'envie et d’un rejet envers l’Azerbaïdjan, comme si une telle nation ne pouvait pas recevoir une conférence de cette envergure. Nous avons été qualifiés de « petrostate » par certains médias occidentaux. Bien qu’en principe, il n’y ait rien de mal à cela. Lors de mon discours d’ouverture, j’ai dit que si on nous avait appelés « petrostate » au XIXe siècle, lorsque nous fournissions plus de 50 % du pétrole mondial, cela aurait été normal. Mais aujourd’hui, quand des fake news viennent d’un pays qui produit près d’un milliard de tonnes de pétrole, je parle des États-Unis, contre nos 30 millions de tonnes, et on nous appellent « petrostate »...
- 30 millions de tonnes ?
- Oui, notre production de pétrole est d'environ 30 millions de tonnes seulement. Quand un voisin de ce pays, je parle du Canada, extrait dix fois plus de pétrole que nous, il est injuste de nous appeler « petrostate ». Mais ce groupe de fake news – et ce n'est d'ailleurs pas ma propre expression, je l'ai empruntée à l'ancien président Trump, et elle me plaît beaucoup, je trouve qu'elle est très percutante et très ciblée – ce quatuor trompeur, comme nous l'appelons, à savoir The Washington Post, The New York Times, Le Figaro et Le Monde – voilà le quatuor trompeur, qui, avec les laquais du Département d'État sous forme de diverses organisations non gouvernementales, ont lancé une campagne de discrédit, des attaques chaque jour. Chaque jour, il y avait probablement une bonne dizaine d'articles, au moins. Chaque jour. Cela ne posait pas de difficultés, mais cela provoquait simplement un sentiment de dégoût et de mépris. Bien sûr, il était difficile d'obtenir des résultats, car nous ne sommes pas un acteur global dans ce domaine. La part de l'Azerbaïdjan dans les émissions mondiales de gaz constitue 0,1 %, tandis que celle des États-Unis est de 12 %, et celle de l'Union européenne...
- Et même cela, ils le sous-estiment.
- Oui, et même cela, ils le sous-estiment.
- Ils sous-estiment de plusieurs fois. C’est un sujet à part.
- Je cite simplement les chiffres officiels. C'est pourquoi nous avons utilisé toute notre expérience diplomatique, et en premier lieu, notre expérience de présidence du Mouvement des non-alignés, qui regroupe 120 pays. L'expérience de notre active participation à l'Organisation de la coopération islamique, afin de créer des ponts et d’obtenir des résultats. Cela n’a pas été facile. Mais, finalement, nous n’appelons pas cette conférence « percée de Bakou » pour rien, car nous avons réussi à faire approuver l'article 6 de l'Accord de Paris, qui était en discussion depuis 2015. Cela fait presque 10 ans que la question des marchés du carbone n'avait pas été réglée. Ici, à Bakou, nous avons réussi à le faire et il est devenu fonctionnel. Cela permettra aux pays de vendre des quotas et ainsi de tenter de maintenir les émissions mondiales dans les limites souhaitées. Et le deuxième point, que certains ont considéré comme un échec, mais que je considère comme une réussite, est que nous avons réussi à approuver le montant des dépenses annuelles pour les questions climatiques. Ce montant est de 300 milliards de dollars. La demande initiale était de 1 billion. Mais il était clair qu'aucun pays n'était prêt à donner un billion, mais si l'on considère que le chiffre précédemment approuvé était de 100 milliards, et ici de 300 milliards, il est difficile de le qualifier d’échec. Et il y a eu beaucoup d’autres avancées. 14 initiatives ont été proposées par l'Azerbaïdjan. La grande majorité des pays ont rejoint ces initiatives, à l'exception des pays comme la France et le Luxembourg. Pourquoi la France, c'est compréhensible. Pourquoi le Luxembourg, probablement en suivant la France. Voilà comment je caractériserais cette conférence. Et bien sûr, 197 pays, 80 chefs d'État et de gouvernement, 76 000 participants inscrits. Et tout cela sur fond de tentatives de boycott. Cela a été une véritable présentation du pays.
- Sans aucun doute, l'Azerbaïdjan mérite des félicitations pour cela.
- Merci.
- Vous avez vous-même mentionné la France et la manière dont l'Azerbaïdjan fait face aux attaques des « fake news ». Le président français s’est même permis des attaques contre l'Azerbaïdjan à l'Assemblée générale des Nations unies. En réponse, vous avez rappelé les territoires d'outre-mer de la France qui font face à un véritable néocolonialisme. À ce moment-là, Josep Borrell est intervenu et a attaqué l'Azerbaïdjan de son côté. Est-il interdit de critiquer l'Europe ? Que se passe-t-il exactement ?
- Ils ne sont pas habitués à ce que quelqu'un leur enseigne la justice. Ils sont habitués à enseigner à tout le monde eux-mêmes. Ils sont habitués à ce qu'on s'incline devant eux, à ce qu'on leur demande des choses, à ce qu'on leur demande conseil, et à ce qu'on ne fasse rien sans leur autorisation. C'est ainsi que les anciens pays coloniaux, aujourd'hui devenus des pays néocoloniaux, ont l'habitude de vivre et de penser, et cela est profondément ancré dans leur conscience. En fait, avec la France, nous n'avons jamais eu de problèmes. Je vous dirai même plus, peut-être qu'avec la France nous avons collaboré plus qu'avec n'importe quel autre pays européen, avant l'arrivée de Macron au pouvoir. Mon père, lorsqu'il a été élu président en 1993, a effectué sa première visite officielle en France. Parce qu'ils étaient les premiers à l'inviter. Lorsque je suis devenu président en 2003, le premier pays à m'inviter a été la France, et j’y ai effectué ma première visite. Ensuite, nous avons activement coopéré, de nombreuses entreprises françaises ont opéré ici. Nos villes sont devenues jumelées avec 13 villes françaises.
- Des villes jumelées ?
- Oui, bien sûr. Mais ces ambitions démesurées et la manie de grandeur injustifiée du régime de Macron ont en réalité tout jeté dans l’abîme. Parce qu’après le début de la Seconde guerre du Karabagh, lorsqu’ils se sont clairement rangés du côté des envahisseurs, c’était le premier signal que tout n’allait pas bien dans nos relations. Enfin, de leur côté. Mais après, ils ont été obligés d’accepter les résultats, même s’ils ont continué à faire tout ce qu’ils pouvaient pour porter atteinte au processus. Récemment, l'ex-Premier ministre M. Barnier, un homme politique français, s’est illégalement déplacé au Karabagh après 2020. Toutes ces tentatives d’ingérence ont conduit à la crise de nos relations. Et après, ça a empiré. Après septembre 2023, ils ont essayé cinq fois de soumettre cette question au Conseil de sécurité et ont échoué cinq fois. Le nombre de pays qui nous soutenaient a empêché qu'ils puissent même mettre cette question à l'ordre du jour. Ensuite, ils ont changé de tactique – comme on dit, nous allons suivre une autre voie, celle de l’Union européenne – et ont essayé de sanctionner l'Azerbaïdjan. Pourquoi ? Parce que nous avons rétabli notre souveraineté ? Et cela a aussi échoué. À partir de là, ils se sont complètement enragés contre nous et utilisent maintenant tous les moyens possibles pour nous discréditer.
En ce qui concerne leur passé colonial, certains perçoivent cela comme notre réponse, mais je pense que cela a peut-être une signification plus profonde. Au début, peut-être qu'on pouvait le voir de cette façon, mais maintenant, lorsque nous nous sommes profondément immergés dans ce sujet, lorsque nous voyons le visage hideux du colonialisme français, lorsque nos représentants communiquent activement avec les habitants des colonies françaises, tant dans leur pays qu'à Bakou et dans d’autres lieux, nous voyons en réalité ce qui a été caché de la communauté mondiale pendant tant d’années. Et pourquoi ? Parce que personne ne voulait s'en mêler. Personne ne voulait de maux de tête. Parce qu'ils font du chantage. Même quand nos relations sont entrées dans une phase de guerre froide, ils envoyaient des messages disant : « N'oubliez pas que nous sommes une grande puissannce. »
- Et qu'est-ce qui est caché ? Vous avez mentionné qu'il y a quelque chose de caché. Qu'est-ce qui est caché ?
- Eh bien, quoi ? L'exploitation impitoyable des ressources naturelles.
- Vous parlez de la Nouvelle-Calédonie ?
- Et pas seulement. Il y en a, je crois, treize ou quinze comme la Nouvelle-Calédonie. Récemment, sur l'une d'entre elles, l'île de Mayotte, il y a eu un tsunami. Euronews a rapporté hier : 75 % de la population de l'île de Mayotte vit sous le seuil de pauvreté. 30 ou 40 % des habitations sont en mauvais état. Et c'est un territoire français sur le plan juridique, bien qu’il fasse partie des Comores. C'est l'une des îles de l'État comorien. Et la France la maintient illégalement. Et selon quel droit ?
En Nouvelle-Calédonie, lors des émeutes, ils ont tué 13 personnes, blessé plus de 100 et arrêté plus de 1000 personnes. De plus, les leaders du mouvement populaire ont été emmenés en France, où ils sont détenus dans des prisons. C’est-à-dire que c’est une dictature de Macron. C’est le régime de Macron. Et quand j’en parle, naturellement, ils envoient tous leurs « chiens de garde » en qualité d'ONG ou de médias. Si, encore une fois, nous, je parle de la société azerbaïdjanaise, commencions à aborder cette question à titre de réponse, maintenant c'est bien plus sérieux. Nous nous soucions naturellement de ces peuples qui sont privés de droits. Comment parler de la Nouvelle-Calédonie lorsque, ici, au cœur de l'Europe, en Corse, on interdit la langue corse, disant que cette langue ne peut pas être utilisée dans les lieux publics ? Où va-t-on ? Et ça, c’est de la démocratie ? Ce sont des droits de l'homme ? Peut-être que la France était autrefois un grand pays, un pays de grands penseurs, de grands scientifiques et écrivains. Mais ce n’est plus le cas. Le régime de Macron transforme essentiellement la France en un Etat en faillite. Regardez, quelques exemples, je vais en donner quelques-uns : l’échec en Afrique, dans la région du Sahel. On leur a dit adieu. Le Niger, le Burkina Faso, le Mali. Le Tchad est sur la liste, qui les a déjà priés de partir, et le Sénégal, où le président a changé et un homme d’esprit national est arrivé. Et ce n’est que le début. L’échec au Liban, un échec total. L’échec en Azerbaïdjan. L’échec en Géorgie. Regardez ce qui se passe en politique intérieure. Une foire d’empoigne. Un nouveau Premier ministre est nommé, et son mari ou sa femme, je ne sais pas qui est qui, devient ministre des Affaires étrangères. Ensuite, après un échec aux élections du Parlement européen, ils font d’eux des boucs émissaires. Ils vont chercher Barnier, qui a été sorti de sa retraite, et aussi il devient bouc émissaire. Maintenant, ils trouvent encore quelqu’un. N’est-il pas préférable de commencer par soi-même ? Comme on disait à l’époque soviétique : « Commencez par l’autocritique ». Eh bien, regardez, Moody’s abaisse les notes de la France mois après mois. Quel triple A, maintenant c’est déjà une a en minuscule. Toute petite, petite, pas grande.
- Là-bas, la dette extérieure est gigantesque.
- Un échec. Un échec après un autre. Et qui est l'auteur de ces échecs ? Monsieur Macron. C'est sur cela qu’ils devraient réfléchir, et non comment nuire à l'Azerbaïdjan. Ils se sont déjà cassé les dents sur nous. Qu'ils en gardent au moins le reste.
- Comment évalueriez-vous ce qui se passe actuellement en Géorgie ?
- En Géorgie, je vois que la situation se stabilise. Et nous en sommes ravis. La Géorgie est pour nous un partenaire très important et un ami proche. Depuis de nombreux siècles, nos peuples vivent en paix et en harmonie, c'est pourquoi la déstabilisation ou la menace de déstabilisation de la Géorgie est tout aussi nuisible pour l’Azerbaïdjan que pour la Géorgie elle-même. C'est pourquoi de notre côté, nous nous efforçons de faire tout ce qui est possible pour que la situation en Géorgie reste stable sur le plan politique et que la Géorgie se développe avec succès.
Encore une fois, en revenant à l'influence extérieure, il s'avère qu'en Géorgie, il y a des milliers d'organisations non gouvernementales qui reçoivent des financements de l'Occident. Et les personnes qui travaillent dans ces organisations ou qui reçoivent un salaire sont probablement des dizaines de milliers, voire plus. Et nous savons ce que cela signifie.
Parce qu'il y a eu une période ici, dans notre pays, où les bénéficiaires de subventions et les bailleurs de fonds se sentaient à l'aise, mais nous avons mis fin à cela. Ainsi, toute subvention accordée par n'importe quelle entité, qu'elle soit nationale ou étrangère, doit être enregistrée, et les autorités compétentes examinent si elle doit être autorisée ou non.
- Cela convient-il aux intérêts nationaux de l’Azerbaïdjan ?
- Oui, bien sûr. Et deuxièmement, l'aide doit être discrète. Parce que l'administration Biden, comment elle restera dans l'histoire, entre autres ? Beaucoup de choses, mais aussi pour sa persistance. « Nous voulons vous aider. » Et nous disons : « Merci, mais ce n'est pas nécessaire. » Non, mais nous voulons. Ils ont une telle institution, l'USAID, qui veut aider, mais pourquoi aider là où nous n’en avons pas besoin ?
- Elle est interdite en Russie.
- Elle n'est pas encore interdite chez nous. Mais je pense que Trump pourrait l'interdire.
- En Russie, nous l’avons nous-mêmes interdite.
- Ah, vous l'avez interdite, c'est bien fait. Je dis que maintenant, je pense qu'elle pourrait disparaître complètement. Voilà, ils veulent aider de manière insistante. Mais nous, en tant qu'adultes, nous comprenons tout. C'est pourquoi nous avons mis de l'ordre ici. Par exemple, les médias azerbaïdjanais ne peuvent pas être financés par des sources étrangères, même à hauteur d'un pour cent. Ils ne peuvent pas. Mais pourquoi ? Nous ne finançons pas les médias aux États-Unis, n'est-ce pas ? Alors pourquoi eux devraient-ils financer nos médias ? Et ainsi, à travers leurs ressources comme la Voix de l’Amérique et la Radio Europe libre », ils dénigrent jour et nuit notre peuple, notre pays, et jettent une ombre sur notre victoire [dans la guerre] contre l'Arménie. Il me semble donc qu'un certain temps a été perdu en Géorgie pour mettre de l'ordre dans tout cela, et quand cela a été fait, il était déjà trop tard. Mais heureusement, la situation tend maintenant vers la stabilité. Et encore une fois, vous voyez, Macron est en action. Il ne peut pas rester tranquille dans son propre pays. Il faut absolument qu'il s'immisce aussi en Géorgie. Et qu'avons-nous vu lors de la cérémonie à la Cathédrale Notre-Dame de Paris ? Le pape François a ignoré la cérémonie, il n'a pas pardonné à Macron ce honteux incident olympique, bien sûr. Et il a bien fait. Il est allé en Corse. Comme pour lui donner une petite piqûre là où ça fait mal.
Donc, pour revenir à la question de la Géorgie, elle est beaucoup plus large qu'il n'y paraît. Et je pense que c'est pourquoi ceux qui sont habituellement envoyés en avant, je parle des pays, pour articuler des sanctions, etc., c'est tout cela. Parce que, si l'on peut faire une analogie, c'est une bataille pour le Caucase. L'Arménie, on sait bien où elle va. En fait, elle est de facto sortie de l'OTSC. D'après nos informations vérifiées, la seule raison pour laquelle elle n'en est pas sortie de jure, c'est qu'elle n'a pas encore reçu l'aval du Département d'État. Dès qu'ils l'auront, ils en sortiront. L'Azerbaïdjan est un acteur indépendant et suffisamment qualifié pour défendre ses intérêts. Donc, la Géorgie est un facteur important dans la bataille pour le Caucase. Comment cela se passera-t-il ? Sera-t-il traditionnel, fondé sur nos valeurs caucasiennes ?
D'ailleurs, concernant Borrell, on m’a dit que je lui avais accordé peu d'attention. Je voudrais lui envoyer quelques signaux en dernier lieu. Bien que j'en aie parlé lors de l'une de mes interventions à la COP, j’avais même cité Borrell, qui a dit que l'Europe était un jardin fleuri, tandis que le reste n'était que des jungles. Et j'avais répondu que si nous étions des jungles, qu'ils se tiennent à l'écart de nous. Mais en ce qui concerne Borrell, je pense que s'il avait vécu quelques décennies plus tôt, il aurait été un excellent ministre des Affaires étrangères du dictateur Franco. Il a simplement eu la malchance de vivre à une autre époque.
- L’Azerbaïdjan est considéré comme le pays le plus russophone du Caucase, ce qui est confirmé par les recherches de l’Institut de la langue russe Pouchkine. La langue russe est pour vous une question qui revêt une importance particulière. Comment parvenez-vous à le faire et qu’est-ce que cela apporte à l’Azerbaïdjan ?
- C'est facile, car c'est demandé dans la société et il n'y a jamais eu et il n'y aura jamais de restrictions, du moins pendant la période de mon père et la mienne. Au contraire, nous essayons par tous les moyens de créer des conditions supplémentaires pour que les gens connaissent mieux la langue russe, pour qu’ils la connaissent parfaitement. Nous avons plus de 320 écoles dans lesquelles l’enseignement s’effectue en russe. Au total, environ un million de nos élèves font leurs études en russe ou l’apprennent comme deuxième langue. 800 000 personnes l’apprennent comme langue seconde. Il existe deux universités : l'Université d'État de Moscou et l'Académie Setchenov. Très souvent, des équipes, principalement des théâtres, viennent régulièrement ici. C'est pour ça qu'elle est demandée, elle vit, elle se sent bien, comme on dit. Qu'est-ce que cela donne ? Eh bien, tout d’abord, d’un point de vue purement pratique, connaître n’importe quelle langue vous enrichit. Et une bonne connaissance de la langue vous donne la possibilité d'approfondir à la fois la littérature et certains développements scientifiques. Après tout, nos scientifiques, par exemple, reçoivent beaucoup d’informations de sources russes. Cela donne à nos collaborateurs la possibilité de communiquer avec leurs amis et confrères non seulement en Russie, mais aussi dans d’autres pays de la CEI. C'est-à-dire que cette communication se fait à travers la langue russe. Je communique en russe avec les présidents des pays membres de la CEI. Nos délégations communiquent en russe. Quand on se rencontre, on parle russe. C'est ce que ça donne. Et, bien sûr, c’est aussi un facteur de réconfort pour la communauté russe en Azerbaïdjan. C’est l’un des facteurs positifs dans les relations interétatiques entre nos pays. Et cela suggère que, je reviens encore une fois à ce dont nous avons parlé : une telle attitude envers la langue russe ne porte pas atteinte catégoriquement à la langue azerbaïdjanaise, ni à notre identité, ni à notre culture. Absolument pas. Au contraire, cela crée une atmosphère très conviviale. Ce n’est pas un hasard si nos positions peuvent différer non seulement sur ce point, mais aussi sur la manière dont les questions d’interaction interreligieuse et de communication interculturelle sont traitées. Ce n’est pas un hasard si Bakou est le lieu où se déroule le Forum mondial sur le dialogue interculturel. C'est-à-dire, tout est interconnecté. Je pense que notre politique a fait ses preuves. Et ceux qui tentent de discriminer la langue pour des raisons politiques commettent une grave erreur.
- Vous avez dit un jour que vous ne permettriez pas la création en Azerbaïdjan d’un nid d’émigrants destinés à des activités subversives en Russie. Et c’est ainsi que cela s’est passé. Est-ce que ça a demandé des efforts ?
- Non, ce que j'ai dit était suffisant. Ils m'ont entendu et ont choisi d'autres directions, dans le voisinage.
- En bref, Ilham Heydarovitch, que souhaiteriez-vous aux Russes pour l’année à venir ?
- La première chose qui me vient à l'esprit est certainement la paix, pour qu'en 2025 la guerre se termine, que les gens rentrent chez eux, vivent en paix et apprennent à se comprendre. Bien évidemment, face à une telle politique de sanctions contre la Russie, je voudrais souhaiter aux dirigeants la même confiance en leur propre force, la même détermination pour l'équipe du président à continuer à tout faire pour minimiser les conséquences négatives de la politique de sanctions, car il est clair que cela ne peut pas se produire sans conséquences. Comme toute société en période difficile, elle se consolide, et nous voyons cette consolidation en Russie. Mon seul souhait est de continuer de la même manière.
Un autre point que je voudrais souligner, que j’ai déjà partiellement évoqué en répondant à l’une des questions, est ainsi : qu’est-ce qui rapproche encore plus nos pays, nos peuples et nos dirigeants ? Il s’agit d’un engagement envers ses racines nationales et ses valeurs traditionnelles. Aujourd’hui, on pourrait dire que c’est rare dans certaines régions. C'est-à-dire que cela nous distingue favorablement, et les tendances que nous observons dans le monde, y compris l'élection de Trump comme président, l'un des facteurs est précisément qu'il est, comme on dit, dans le même bateau que nous, en ce qui concerne valeurs traditionnelles. Et je pense que nous pourrons inverser cette tendance néfaste à l’humanité, cette débauche, cet obscurantisme ostentatoire que nous avons vu à l’ouverture des Jeux olympiques de Paris, et la faire reculer. Les dirigeants le feront, la société qui fait confiance aux dirigeants le fera, nous le ferons. Nécessairement. Sinon, nous nous retrouverons en minorité. Et nous ne pouvons pas être en minorité.
Et je souhaite, bien sûr, mes vœux de bonheur et de prospérité à tous les Russes pour la nouvelle année.
- Merci beaucoup, Ilham Heydarovitch, pour cette magnifique interview.
- Merci à vous.